J’ai toujours eu l’impression d’être sur une planète qui n’est pas celle qui me correspond. Une façon de penser et de ressentir tellement différente. Je pourrais en dire autant pour ceux qui m’ont toujours dit « tu es bizarre », « pourquoi tu te poses ce genre de questions », « tu abuses », « tu ne sais pas passer une journée sans chialer ? On ne peut pas parler avec toi ». J’en passe tellement des similaires…
Comment s’intégrer quand on est un intrus ? Eh bien, en ne l’étant plus. C’est logique mais faut-il vraiment à chaque fois perdre sa personnalité qui peut apporter peut-être quelque chose à une société, car il faut se contenter de suivre le troupeau ? C’est contre-évolutif… S’il n’y avait pas ce mouton noir qui avait cherché à trouver un autre moyen de sortir, le troupeau serait-il parvenu à s’échapper de ce loup ? Courir en groupe sans regarder autour c’est contre-évolutif.
Est-il possible d’être différent, et à quel prix surtout ? Celui de la solitude… Car si tu ne ressembles pas à la norme, qui n’est pour moi qu’une histoire de majorité et donc de moyenne, tu es en dehors. Tu es déviant et tu es donc évité, rejeté. La solution… Imiter.
J’ai fait semblant d’aimer ce que vous aimez, alors que je le détestais du plus profond de mon être. J’ai cessé d’exprimer mes questionnements « perturbateurs », qui ne faisaient plus que tourner en boucle dans mon crâne. J’ai cessé de montrer que j’aimais… Pour laisser place à une haine irrationnelle envers moi car j’étais tout ce que je ne suis pas. Et là, vous savez quoi ? Vous m’avez intégrée… Vous avez intégré cette personne qui devait se taire pour exister… Cette personne qui disparaissait avec le temps, celle qui ne rêvait que d’exploser pour disparaitre physiquement de ce monde… Est-ce utile de se ressembler ? Est-ce utile d’avoir une vision du monde commune sans ne jamais rien remettre en question sous prétexte que « c’est comme ça ». Dois-je aimer ce que vous aimez pour que vous, vous me considériez ? Vous ne voulez donc
intégrer que vous-même ?
Pourtant, je vous ai toujours intégrés… Que vous aimiez ce que je détestais, que vous fassiez ce qui est contre-productif pour moi, tant que vous me respectiez, je vous intégrais. Et même en parlant de respect… C’est une question actuelle, car même si vous ne me respectiez pas auparavant, je vous considérais comme toute autre personne.
Je vous déteste désormais. J’ai une haine envers ces personnes fermées d’esprit, ces personnes qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez et qui n’acceptent pas une caractéristique divergente, même de peu. Ces personnes qui aiment faire du mal pour se sentir supérieures. Si vous avez besoin de détruire pour être au-dessus, c’est qu’il y a bien des personnes qui vous dépassent, non ?
Mais suis-je légitime de vous détester ? Oui, ce sont mes goûts, nous ne correspondrons jamais à tout le monde. Mais suis-je légitime de ne pas vous intégrer pour autant ? Non. Car même si vous me rebutez, même si vos valeurs ne sont pas celles que je partage, jamais je ne vous considèrerai moins que quiconque. Je vous parlerai comme je parle à tout le monde, je vous saluerai comme je salut tout le monde
et ce, sans aucune arrière-pensée. Car vous existez et votre but n’est pas de me correspondre pour œil et pour dent. Nous avons tous notre vision du monde, nos valeurs, nos goûts, pourquoi ne pas juste tout se partager ?
Des goûts, des valeurs. Nous sommes uniques, personne n’est identique, même des jumeaux peuvent avoir des valeurs différentes. Nous ne sommes pas là pour nous aimer, nous vénérer, mais nous sommes là pour vivre en société. Si une personne ne nous plait pas, pourquoi se l’imposer et lui rendre la vie difficile ? Elle a le droit de ne pas nous correspondre et nous avons le droit de ne pas lui correspondre. Votre but est- il de créer un seul et même humain ? C’est contre-évolutif. Considérer est une chose, aimer en est une autre. Chaque personne existe comme elle est, elle mérite sa place comme la tienne, car elle aussi te perçoit aussi « bizarre » que toi tu la perçois. Liberté, Egalité, Fraternité. Et si un jour, cette devise pouvait réellement nous être associés ?
Stéphanie Vetro