Chronique d’un surdoué en dépression et d’une pandémie : chapitre 1, janvier
Chronique d’un surdoué en dépression et d’une pandémie : chapitre 1, janvier

Chronique d’un surdoué en dépression et d’une pandémie : chapitre 1, janvier

17 janvier 2020 : c’est là que je commence, pourquoi ? Parce que c’est la date décisive, la date où tout à changé tient. Comment vous faire comprendre sans vous faire vivre ce qui a fait déborder le vase ? Vous pourriez me dire que le vase était plein… Certes, mais je pense que nous aurons le temps d’aborder le vase, comment je l’ai rempli et la taille qu’il faisait tout au long de ces. Et puis, commençons par de l’action ! Cela nous mettra en train. Hue !! Jolly Jumper, en selle et partons à la rencontre d’une date qui a changé le cours de ma vie.

Tout commence et tout fini par un sourire.

Un sourire unique, gravé dans ma mémoire, un sourire qui, par sa simple existence, a établi mon échec et m’a permit de faire l’acte le plus courageux de ma vie. Un sourire éclatant, en coin de bouche, les dents découvertes mais fermées, un sourire lancé en pleine course, ce genre de sourire qui veut tout dire alors que vous voyez la personne partir, que votre main est encore en chemin pour la rattraper, qu’elle tourne la tête et que vous apercevez un quart de seconde avant qu’elle se retourne pour contrôler sa course.

Ce type de sourire, malicieux, plein de joie et de vie, le sourire du jeu, du jeu gagné, de l’instant décisif où vous savez que vous avez bien joué, que vous avez visé juste et que la coupe est à vous, que l’autre n’est plus qu’un adversaire vaincu. Le sourire de l’enfance et du défi, le sourire de l’impatience et de la satisfaction de l’effort récompensé. On y vois la vie, on y voie l’espoir et l’ingéniosité de l’enfant qui n’a qu’un seul objectif, gagner le jeu, et qui n’est concentré que sur celui-ci alors que vous êtes encore en train de penser à votre lessive du lendemain ou de la facture d’électricité.
Il y a de belles choses dans ce sourire, il y a l’intelligence et la malice propre à cette tranche d’âge, il y a le plaisir d’avoir atteint l’objectif tant attendu, cet objectif qui nous motive tout le long de notre vie, le frisson offert par l’atteinte et le dépassement de la limite, de la règle instituée par des systèmes que nous ne comprenons pas, ce sourire c’est un peu de la liberté et de la révolte qui forment l’être humain. Ce sourire c’est toute une réalité pour certains, seul instant de plaisir dans un quotidien complexe et injuste.
On se sent fort quand l’autre se sent faible, quand on peut, une fois, inverser la hiérarchie.

Un quart de seconde qui vous suffisent pour comprendre que c’est fini, que l’autre s’amuse de savoir que vous ne pourrez rien faire, qu’il s’amuse de savoir que vous devrez prendre sur vous, qu’il prend plaisir à se voir gagner et donc à vous voir perdre.

Sauf que ce sourire, moi, je m’était promis de le fuir à tout pris et pour toujours. Moi qui l’avait tellement connu dans mon enfance. On oublie pas le sourire de ceux qui vous forcent à rouler avec votre vélo neuf dans la merde de chien sous peine de vous rouer de coup, ni de ceux qui se mettent à plusieurs pour vous lancer des pierres et des bâtons. Ces souvenirs là on les garde et l’humiliation est toujours accompagné d’un sourire des plus abjecte, ce sourire qui vient du plaisir ressenti à être du côté des forts. L’amusement, l’amusement face à la violence, voilà quelque chose que je n’ai jamais compris.

Et puis il y avait les adultes, les adultes qui encaissaient aussi ce genre de sourire, qui passaient leur temps à faire de l’ordre pour qu’après nous parlions dans leur dos tout en cherchant un moyens de retrouver le sourire. Quand j’ai commencé à aborder ma vie d’adulte, je m’était fait cette promesse de ne pas me mettre dans la même situation que ces adultes que nous appelons professeur-e-s, enseignant-e-s, maitres-se, surveillant-e, éducateur-e-s, de me protéger de ce qu’ils ont du subir, de me protéger des ces sourires adolescents qui sont si beaux et si durs à la fois.

Alors quand j’ai compris, quand je l’ai vu et ai réalisé ce qu’il impliquait, quand cette simple composition de muscles tendus s’est imposée à moi et a rempli un vase déjà bien plein, je me suis effondré. Pas physiquement, pas immédiatement mais tout en douceur je me suis effondré et j’ai creusé, j’ai creusé plus profond et plus vite que je n’avais creusé de toute ma vie, j’ai creusé mon corps et mon esprit. Je ne sais pas ce que je cherchais, peut être que je cherchais simplement la destruction de ce que j’étais tant l’horreur de ma situation me faisait mal mais je sais ce que j’y ai trouvé, un terrain, un terrain abimé, un terrain dont il fallait recommencer l’exploitation mais un terrain constructible ainsi que tous les matériaux nécessaires.

C’est de cette reconstruction que je voudrais parler.

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